A la DécouVerte d’Euralille, de la Porte de Valenciennes à Lille Flandres
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Comme chaque année la DécouVerte de la mi-août est consacrée à Euralille, et à l’évolution du quartier pendant les 12 mois écoulés. Dominique Plancke rappelle qu’il organise cette visite depuis 1995 et commence par un petit rappel de l’histoire de ce quartier.

Petit rappel historique avant de commencer la balade

C’est l’annonce à la fin des années 80 de l’arrivée du TGV à Lille qui entraîne la décision de créer un nouveau quartier, d’abord dénommé le Centre International des Gares. Une société d’économie mixte chargée de l’aménagement de cette ZAC de 90 hectares à cheval sur Lille et La Madeleine, Euralille, est créée, présidée par Pierre Mauroy. Devenue société publique locale, on lui confie ensuite en 2000 la ZAC Euralille 2 pour aménager la zone de 22 hectares qui comprend aujourd’hui le siège du Conseil régional, le Bois Habité et le triangle où s’élève maintenant le Rectorat. En 2006 ses missions s’étendent à la ZAC de la Porte de Valenciennes sur une superficie 16 hectares. Aujourd’hui la SPL est aussi missionnée sur l’aménagement de la friche de la gare St Sauveur. Les trois ZAC s’alignent sur plus de deux kilomètres en un long ruban à l’emplacement des anciennes fortifications de la ville, resté inconstructible jusque 1985.

La fermeture de la ligne 2 du métro pour travaux a obligé les participants à la balade de ce jour à faire preuve d’imagination et de patience pour rejoindre la station de métro Porte de Valenciennes. La visite commence au pied de la tour Clémenceau, témoin isolé des immeubles de logements HLM de la reconstruction après la deuxième guerre mondiale.  6 immeubles au nom évocateur de la première guerre mondiale comptant au total 346 logements sociaux ont été démolis aux abords de cette tour depuis 2005 : les immeubles Somme et Marne, le petit et le grand Verdun et enfin le petit et le grand Clémenceau.

La Porte de Valenciennes était l’une des portes qui donnait accès à la ville dans les remparts construits au 19ème siècle, après l’agrandissement de la ville en 1858. Il est difficile de reconstituer aujourd’hui le paysage urbain tel qu’il était il y a 10 ans : les voiries ont été détournées, avec le raccordement direct du boulevard Painlevé au boulevard de Belfort, le prolongement de la rue de Cambrai, et le nouveau tracé de l’avenue Cordonnier.

Un nouveau quartier entre Fives et Moulins

De nouveaux immeubles de logements, au nom d’une banalité affligeante (Lux, Métropolis, …), viennent maintenant s’accrocher au boulevard entre l’Onera et la tour Clémenceau. Quand elle sera achevée, en 2022, la ZAC de la Porte de Valenciennes devrait compter 1070 logements, dont 30% de logements sociaux, 9000 mètres carrés de bureaux, 7500 mètres carrés de commerces et d’activités, et des équipements publics. Le long du périphérique la ville a récemment annoncé la construction prochaine d’une salle de sports privée, qui formera écran avec le trafic routier de l’autoroute. Les commerces annoncés tardent à s’installer : pour l’instant seul un livreur de pizzas a ouvert ses portes. En pénétrant au coeur de l’îlot par la rue de Verdun, la trentaine de participants à la DécouVerte est saisie par la densité étouffante et la proximité des immeubles : on pourrait presque se serrer la main d’un balcon à l’autre. Le fameux ruban vert  vanté par la SPL Euralille et la municipalité, censé être une promenade reliant les îlots est sur le terrain réduit à la portion congrue.Comment vont vieillir ces nouvelles résidences ? Rendez-vous dans trente ans pour voir si elles ne vont pas subir le sort des résidences qu’elles ont remplacé.

La multiplication des affichettes « vérifiez que la porte est bien fermée » témoigne aussi du problème de la sécurité vécue par les habitants qui vivent dans un chantier permanent, pour certains depuis 6 ans.

De l’autre côté du boulevard de Belfort, derrière les palissades colorées, entre la Place Guy de Dampierre et le nouveau boulevard, le chantier de construction de l’immeuble qui doit accueillir le nouveau siège de Partenord à l’angle de la rue de Cambrai a débuté depuis quelques mois. Il est aussi prévu ici la construction d’un groupe scolaire de 16 à 18 classes. En revanche le foyer de jeunes travailleurs de 167 chambres qui faisait partie des projets retenus par l’ADIVbois pour la réalisation d’immeubles en bois dans 23 villes de France est abandonné. La Ville de Lille a vraiment du mal à accepter les projets de construction en bois. D’autres immeubles de logements et des commerces seront donc construits à la place.

A l’angle de la rue de Cambrai et du boulevard Painlevé, Christiane Bouchart nous présente la Maison Stéphane Hessel, ouverte depuis l’automne 2015, qui abrite l’Auberge de Jeunesse, la Maison de l’économie sociale et solidaire et un équipement d’accueil de la petite enfance.  L’eau pluviale y est récupérée pour alimenter les sanitaires et la chaleur des eaux usées permet de chauffer les douches. Avec sa voisine, la Maison de l’économie sociale et solidaire, l’auberge partage des bacs de culture et des vélos. Elle est aussi partenaire du Court-Circuit, qui propose des paniers de produits locaux à récupérer à l’auberge.  L’immeuble est spectaculaire et très identifiable, mais l’usage n’en est pas toujours simple, du fait des volumes et de quelques malfaçons.

Dans l’entre-deux guerres la municipalité lilloise avait imaginé un vaste programme d’équipements voués à l’éducation et à l’hygiène sur ce secteur depuis la cité administrative jusqu’au Jardin des plantes : résidences universitaires, Foire Internationale de Lille, institut de mécanique des fluides (devenu l’Onera), école de plein air, observatoire astronomique, jardin des plantes et même l’institut de médecine légale (!). La Maison Stéphane Hessel s’inscrit dans cette histoire. Un regret : l’absence d’anticipation de l’aménageur qui n’a pas prévu de stationnement pour les nombreux autocars qui amènent les groupes à l’Auberge et qui stationnent donc en empiétant sur les bandes cyclables.

L’ascension du Belvédère, butte engazonnée et arborée entre le boulevard et la friche de la gare St Sauveur est devenu un rituel dans cette DécouVerte de la mi-août. Dominique Plancke explique comment un tour de passe-passe a fait passer  cet espace de la ZAC de Porte de Valenciennes, où il était présenté comme le « poumon vert » de ce futur quartier, à la ZAC de St Sauveur, où il est devenu une réserve foncière sur lequel la MEL et la Ville veulent maintenant construire une piscine olympique qui doit remplacer celle de Marx Dormoy

Nous découvrons face à nous la friche de l’ancienne gare de marchandises de St Sauveur, désaffectée depuis le transfert de ses activités sur la plate-forme multimodale de Dourges il y a plus de 10 ans.

Au printemps le collectif qui s’oppose au projet d’urbanisation de la friche St Sauveur proposé par la Ville et la MEL a planté plusieurs centaines d’arbres et d’arbustes. Une association PARC  a été créée qui envisage un recours en justice contre ce projet.

L’aménagement de St Sauveur, un projet archaïque et dépassé ?

Le groupe EELV de Lille soutient la démarche de PARC et estime que le projet d’aménagement de cette friche présenté en 2013 est aujourd’hui archaïque et dépassé. S’ils sont favorables à une ville qui n’empiète pas sur les terres agricoles, les écologistes lillois défendent aussi une ville verte, avec plus d’espaces de respiration et de rencontres. Aujourd’hui la densité d’espaces verts par habitant est insuffisante à Lille. Le projet Gehl, qui prévoit 2500 logements sur la friche St Sauveur, va encore faire baisser le ratio de mètres carrés d’espace vert par habitant. Ce n’est pas acceptable et c’est incohérent quand on prétend défendre les engagements de la COP 21 et lutter contre le réchauffement climatique. Contribution du groupe

Le Bois Habité

Passé le pont qui enjambait les voies ferrées qui desservaient la gare St Sauveur, nous quittons la Zac de la Porte de Valenciennes pour rejoindre la Zac Euralille 2. Rue de Bavay, derrière l’immeuble du CNFPT, le chantier de l’immeuble du Rectorat  s’achève et accueillera à partir de janvier les agents qui travaillent aujourd’hui qui travaillent à l’inspection académique rue Claude Bernard et à partir d’avril ceux  de la rue St Jacques. 800 personnes au total. Comme souvent l’architecture de l’immeuble une fois terminé est beaucoup moins alléchante que ce qui avait été présenté sur les photos des maquettes.

Notre groupe pénètre dans le Bois Habité. Dans ce petit quartier coincé entre le périphérique et l’avenue Hoover, les arbres ont pris de l’ampleur. Devant certaines façades, les branches se font même envahissantes, ce qui pose la question du choix des essences plantées. Ce quartier est plutôt calme, les immeubles de bureaux constituent un écran efficace contre le bruit des voies routières qui l’entourent. La mixité des immeubles et des espaces verts privés, publics et semi-publics semble fonctionner. Les commerces longtemps attendus par les premiers habitants se sont installés en pied d’immeuble côté boulevard Hoover. Mais il n’y a plus d’association d’habitants et guère de vie collective dans ce quartier.

Exit l’agence du médicament, qui laisse le champ libre à la MEL en 2019 ?

Passé le siège du Conseil Régional des Hauts de France, qui accueille 1500 agents sur les 9000 qu’emploie l’institution (6000 travaillent au sein des lycées et 800 dans les ports de Boulogne et Calais, les autres sont à Amiens et sur différents sites de la région), nous nous arrêtons devant ce qui a longtemps été porté le nom de « champ libre », dans les documents de la SPL Euralille. On avait parlé pour cet espace d’un jardin, puis d’un grand hôtel, puis de l’extension de Lille Grand Palais, avant qu’il ne soit proposé d’y construire l’Agence Européenne du Médicament, si la candidature de Lille était retenue parmi 13 villes européennes pour accueillir cette agence qui doit quitter la Grande Bretagne suite au Brexit. La candidature de Lille n’ayant finalement reçu que les seules voix de la France,  mais le promoteur a réussi à convaincre la MEL de venir y installer ses bureaux, ce qui devrait être fait en 2019, si l’équation financière de l’opération est confirmée. Avec deux autres groupes politiques, le groupe des élus EELV de la MEL a demandé des comptes sur cette opération.

Les avatars des liaisons cyclables entre le centre et Fives

La piste cyclable entre l’avenue du Président Hoover et le Pont de Fives est rouverte, même si son tracé zig zague en fonction du chantier du Biotope. Mais sur le Pont de Fives, la piste cyclable est toujours fermée à la circulation en allant du centre vers Fives. La structure même du pont serait menacée, alors que le Département avait posé quelques rustines en août 2016. La date de la réouverture n’est même pas programmée par la MEL qui a récupéré la responsabilité de cet ouvrage en janvier 2017. Les cyclistes doivent donc emprunter la nouvelle piste cyclable de l’autre côté du pont. Cette (belle) piste relie désormais la rue Pierre Legrand à Fives à la rue Javary et à la rue de Tournai. Sur le pont elle a donc été mise à double sens dans l’attente des travaux de l’autre côté. Cette voie cyclable évite maintenant aux cyclistes de servir de ralentisseur vivant pour les voitures qui empruntent la rue Javary.

 

Roms : des expulsions à répétition qui ne font qu’enfoncer des familles dans la précarité

Le groupe s’engage sur la gauche dans le passage qui relie le pont de Fives à la rue de la Chaude-Rivière, occupé depuis de nombreuses années par des familles roms roumaines habitant en caravane. Dominique Plancke, qui milite aussi au Collectif Solidarité Roms de Lille Métropole explique que ce bidonville que nous traversons abrite actuellement une petite vingtaine de familles dont deux sont d’ailleurs en train de s’installer lors de notre passage. Elles habitaient jusqu’ici le bidonville du carrefour Pasteur, dont la Préfecture a annoncé le démantèlement pour le lundi 20 août. La trentaine d’autres familles présentes à Pasteur a aussi quitté le site depuis hier vendredi pour se réfugier sur d’autres sites à proximité. Seules 5 familles ont eu une promesse de relogement par la Préfecture. Ces déménagements forcés à répétition ne résolvent rien. Les familles concernées sont en France pour certaines depuis dix ans, les enfants sont scolarisés à Lille. Les expulsions ne font que les renvoyer dans des situations encore plus précaires et rendent plus difficiles la scolarisation. Pourtant le gouvernement a publié le 25 janvier une circulaire visant à la résorption en 5 ans des bidonvilles qui prévoit de mobiliser les services de l’état, les associations et les roms eux-mêmes pour faciliter leur insertion. Mais le Préfet du Nord ne l’applique pas.

Passant sous la voie ferrées, nous arrivons rue de la Chaude Rivière et nous découvrons face à nous l’ensemble EKLA dont la construction s’achève. Nous sommes aux limites de Fives, au delà du périphérique, mais toujours dans la première Zac d’Euralille. Cette nouvelle réalisation, à l’emplacement de l’ancien château de Fives compte 15.000m² de bureaux dans l’immeuble le plus bas en bordure du périphérique, et de 127 logements dans une tour de 17 étages avec des commerces prévus en pied d’immeuble. On verra à l’avenir comment la greffe prendra avec le quartier de Fives situé à ses pieds.

Nous contournons cet immeuble. A l’angle de la rue de l’Alma Christiane Bouchart  fait un bref rappel sur la lutte menée par les habitants de ce quartier ouvrier à la fin des années 70. Les courées et les petites maisons ont été rasées, mais les habitants ont obtenu des résidences HLM à taille humaine, au contraire de la « résidence » construite quelques années plus tôt de l’autre côté au 29 de la rue Eugène Jacquet. En longeant la bretelle d’accès au périphérique, nous rejoignons les Dondaines (qui fut un bidonville jusqu’au début des années 70) et montons sur la partie du Parc qui surplombe la Ferme Marcel Dhenin. Le Parc s’est étendu l’an passé en absorbant le terrain situé au dessus de l’entonnement du TGV. Les animaux de la Ferme y ont gagné de nouvelles pâtures et les promeneurs de nouveaux espaces plantés plutôt agréables malgré la présence du périphérique quelques mètres plus bas. Deux grandes ruches à l’architecture contemporaine ont été installées là cette année. Le rucher municipal qui était à la Ferme est parti depuis l’an passé au Jardin des Plantes à Moulins.

Euralille 3000

Un projet a été engagé par la SPL Euralille pour « revisiter » la première ZAC d’Euralille entre les gares. Pour le densifier du côté « Ilot St Maurice », rue du Luxembourg et pour tenter de le rendre plus vivant en dehors des horaires de travail et des arrivées de TGV. L’accès à la gare par le boulevard de Turin devrait être revu avec un parvis. Pour l’instant l’accueil des passagers des bus « macron » se fait toujours sur ce boulevard dans des conditions très « low-cost » et en provoquant des embouteillages inextricables.

Ce projet dénommé « Euralille 3000 » a démarré avec l’opération Swam (grotesque déformation anglo-saxonne à des fins commerciales de Souham, maréchal dont l’ancienne caserne située à côté porte le nom). Cet immeuble qui s’achève au bord du Parc Matisse accueillera des bureaux, mais aussi de nouveaux commerces (en principe pas les mêmes qu’en face), et des restaurants, dont un restaurant gastronomique et panoramique. Le nouvel immeuble sera doté d’une promenade reprenant le tracé des anciens remparts du bastion situé devant la Porte de Roubaix, témoin de l’enceinte espagnole du 17ème siècle. L’architecte a du s’adapter aux éléments archéologiques de l’ancien Faubourg des Reignaux découverts en 2016 sur le site.

Depuis quelques mois, la SPL Euralille pilote l’opération Euraflandres autour de la gare Lille Flandres. 13 millions d’euros vont être dépensés ici entre la rue du Molinel et le viaduc le Corbusier. La fontaine devant la gare a été supprimée. Il faudra attendre que les travaux soient achevés pour juger du résultat, qui selon les esquisses sera très minéral et où les vélos risquent d’avoir du mal à trouver leur place. La place des taxis reste aussi encore aujourd’hui un mystère : resteront-ils ou pas sur la Place des Buisses ?  On verra à la fin combien pèse leur puissant lobby. La SPL a lancé un « Concours de maîtrise d’œuvre sur esquisse pour la conception d’une architecture légère sur la place des Buisses », « dans le cadre de Lille Métropole World Design Capitale 2020 » ! En attendant, la gestion du chantier est vraiment calamiteuse, et  très pénalisante pour les (très nombreux) piétons qui fréquentent ce secteur.

La balade s’achève à 16 h 45 à l’angle de la rue des Canonniers.

Une réflexion au sujet de “A la DécouVerte d’Euralille, de la Porte de Valenciennes à Lille Flandres

  1. Pour l’ Auberge de Jeunesse :
    – s’il n’y a pas un site dédié pour le stationnement des BUS -de toute urgence-
    l’ A J fermera : il y eu une chute de fréquentation : pour de nombreuses raisons cumulées.

    De plus, il n’y a aucun fléchage dans la Ville pour guider les  » ajistes « .

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